

France: vers une croissance ralentie, mais sans redémarrage de l'inflation
L'économie française devrait croître "légèrement" au deuxième trimestre, ralentie par l'incertitude liée aux droits de douane américains, mais sans redémarrage de l'inflation, a estimé mardi la Banque de France, ce qui ouvre la voie à une nouvelle baisse des taux en zone euro.
Après une hausse de 0,1% du produit intérieur brut (PIB) au premier trimestre, "l'activité progresserait légèrement au deuxième", a-t-elle indiqué dans son enquête mensuelle de conjoncture.
"Notre enquête confirme une certaine résilience de l'économie française", a souligné son gouverneur, François Villeroy de Galhau, dans un entretien aux journaux du groupe Ebra.
"Pour autant, celle-ci est affectée par les incertitudes, et il semble que l'incertitude internationale ait pris le pas sur l'incertitude nationale", a-t-il ajouté.
"A ce stade, nous voyons pour 2025 une croissance ralentie, mais sans récession", a-t-il précisé.
La Banque de France, qui table actuellement sur une croissance annuelle de 0,7%, comme le gouvernement, actualisera ses prévisions macroéconomiques en juin.
- "Cap économique européen" -
Elle a toutefois précisé que sa prévision trimestrielle était encore "très préliminaire" en raison d'un mois de mai marqué par plusieurs jours fériés "et des incertitudes sur les droits de douane".
De son côté, l'Institut national de la statistique (Insee) anticipe une croissance de 0,2% au deuxième trimestre.
Washington a imposé des droits de douane de 25% sur l'acier, l'aluminium et les automobiles en provenance de l'Union européenne, et de 10% sur la plupart des autres biens exportés. Bruxelles a menacé, le 9 mai, de taxer les voitures et avions américains en cas d'échec des négociations.
"Le protectionnisme de l’administration Trump entraînera un redémarrage de l'inflation aux Etats-Unis, mais pas en Europe, ce qui permettra sans doute une nouvelle baisse des taux d’ici l'été", a indiqué François Villeroy de Galhau, qui siège dans l'instance de décision monétaire de la Banque centrale européenne (BCE).
En avril, la BCE avait baissé ses taux, pour la septième fois depuis juin 2024, espérant contrer l'effet des tensions commerciales exacerbées avec les États-Unis qui menacent la croissance. Le taux de dépôt, qui fait référence, a été abaissé de 25 points de base, à 2,25%.
Sa prochaine réunion de politique monétaire est prévue début juin.
"Mais, pour lever l'incertitude, et dès lors qu'il n'y a malheureusement plus de cap américain, il est très important de donner un cap économique européen: il est urgent de construire la souveraineté économique et financière de l’Europe", a plaidé le gouverneur de la Banque de France.
Il a appelé à "une mobilisation générale européenne. Cela ne se fera pas tout seul; il faut agir maintenant et fortement selon les recommandations du rapport Draghi: intégrer plus notre marché unique, investir mieux, innover plus vite avec moins de bureaucratie".
- Attentisme -
Dans ce contexte, l'indicateur d'incertitude de la Banque de France, basé sur une analyse textuelle des commentaires des quelque 8.500 entreprises interrogées entre le 28 avril et le 6 mai, a remonté légèrement dans les services et l'industrie en avril, mais il s'est replié dans le bâtiment.
A l'exception du secteur viticole, "il n'y a pas d'effet direct à ce stade sur l'activité des hausses de droits de douane américains. En revanche, il y a sans doute un effet indirect via l'incertitude, via les comportements attentistes que cela génère", a noté son chef économiste, Olivier Garnier, lors d'une conférence de presse.
L'activité serait soutenue, entre avril et juin, par les services marchands et l'industrie manufacturière, tandis que la construction se replierait.
Sur le seul mois d'avril, l'activité a "nettement" progressé dans l'industrie et le bâtiment, et "plus modérément" dans les services marchands.
La construction a enregistré un sursaut, profitant notamment de la baisse des taux d'intérêt.
Alors que l'agroalimentaire, la pharmacie ou l'automobile ont tiré l'activité industrielle, l'aéronautique a perdu en dynamisme "en raison de la baisse du dollar qui affecte les ventes aux Etats-Unis et de difficultés sur la chaîne logistique".
Les carnets de commande restent jugés dégarnis, sauf pour l'aéronautique.
En mai, l'activité est attendue en repli dans les trois grands secteurs en raison des fermetures liées aux ponts.
G.Muller--LiLuX